dimanche 7 août 2011

La Bible, les Psaumes et la prière chrétienne

L’Ecriture Sainte ne se présente pas comme le développement de concepts de plus en plus élaborés mais comme l’approfondissement de vérités très riches et très simples. Au cœur de cette révélation se trouve le Dessein de Dieu qui se déploie à travers la découverte progressive de son Visage. Cette contemplation du mystère se fait traditionnellement à travers la récitation du Psautier qui récapitule toutes les attentes d’Israël. 
Le fait que la prière psalmique d’Israël soit devenue naturellement la prière de l’Eglise atteste bien la continuité indissoluble qui se manifeste au sein de la Parole de Dieu. 


Le Psautier est le chemin par lequel Dieu veut nous apprendre à prier, à Le prier. Cette prière se concrétise dans la réception de sa Parole pour se transformer en prière eucharistique en associant nos vies à l’œuvre transfiguratrice du Christ.

Le Psautier peut être aussi considéré, nous le verrons par la suite, comme la véritable somme théologique et spirituelle de l’Ecriture Sainte,  son résumé, son condensé le plus intense et surprenant. La tradition juive et la tradition chrétienne en ont eu vivement conscience. Toute la sainte Tradition y a perçu clairement sa vertu récapitulative, tous les autres livres inspirés se trouvant comme fondus dans la plus magnifique des prières que forme le psautier

Ainsi les mystères du Christ, de l’Église et de ses sacrements, les souffrances et les résurrections spirituelles du chrétien,  l’annonce de la fin des temps et l’avènement de la Jérusalem définitive rythment continuellement ces chants de louange et d’action de grâce, de repentir et de supplication. Se nourrir des psaumes, c’est ainsi apprendre prier chrétiennement.

Il suffit, en effet, d’ouvrir le livre des Psaumes pour constater que tous les thèmes qui vont s’accomplir dans la nouvelle Alliance s’y trouvent comme en une éclosion sublime. Au fil de ces chants de combat, d’appels et de détresse, de confiance et d’épreuve, de souffrances et de triomphe, le fidèle découvre l’ensemble des secrets que Dieu dévoilera définitivement au cœur de l’homme par la présence de son propre Fils. Dans le psautier tous ces secrets sont livrés sous forme d’une prière destinée à nourrir quotidiennement le cœur des fidèles. Mettons-nous donc à son école. Voici dix clé de lecture, comme 10 commandements pour assimiler la psautier et par là tout le message biblique qui s’y trouve récapituler :


-       En priant le psautier, nous apprenons que la prière est avant tout écoute et réception de la Parole et que cette Parole permet discerner le sens de la Création : « Ta parole est une lampe à mes pieds, une lumière sur mon sentier » (Ps 19). La création de Dieu est sacrée. Elle nous instruit sur le dessein du Créateur (louange cosmique du Ps19 ou 148).

-       Nous prenons conscience que Dieu intervient en permanence dans l’histoire, qu’Il est l’alpha et l’Omega de l’histoire, qu’Il ne lâche pas l’humanité malgré le grand nombre de ses déviations : « mainte et mainte fois il les délivra, mais eux par bravade se révoltaient et s’enfonçaient dans leur tort ; Il eut un regard pour leur détresse alors qu’Il entendait leur cri ; Il se souvint pour eux de son Alliance, Il s’émut selon son grand Amour ; Il leur donna d’apitoyer tous ceux qui les tenaient captifs » (Ps 106)

-       Cette intervention de Dieu dans l’histoire appelle le cœur de l’homme pour porter la Création à son achèvement. Il y faut un cœur brisé c'est à dire qui s'ouvre à l'information révélée  : « car tu ne prends aucun plaisir au sacrifice ; un holocauste tu n’en veux pas. Le sacrifice de Dieu, c’est un esprit brisé ; d’un cœur brisé, broyé, Dieu tu n’as point de mépris » (Ps 51).

-       Mais pour que ce cœur puisse irriguer la vie, il lui faut prendre conscience de sa responsabilité et du risque que son refus fait courir au plan divin « les hommes se sont corrompus, leurs actes sont abominables : aucun qui fasse le bien ! Yahvé, du haut des cieux, regarde les fils de l’homme, pour voir s’il en est un qui soit sage et qui cherche Dieu : tous sont égarés, tous sont pervertis, pas un qui fasse le bien, pas même un seul » (Ps 14)

-       Après quoi l’homme peut découvrir les sublimes secrets de la Miséricorde de Yahweh : « yahvé est miséricordieux et compatissant, lent à la colère et riche en bonté. Ce n’est pas pour toujours qu’Il réprimande, il ne garde pas à jamais sa colère. Il ne nous traite pas selon nos péché, Il ne nous châtie pas selon nos iniquités. Autant les cieux sont élevés au-dessus de la terre, autant sa bonté est grande envers ceux qui le craignent. Autant l’Orient est loin de l’Occident, autant il éloigne de nous nos transgressions. Comme un Père a compassion de ses enfants, Yahvé a compassion de ceux qui le craignent » (Ps 103)

-       Cette miséricorde de Dieu demande des cœurs pauvres. Le psautier finalement est le recueil de prières de ces anavim à qui le Christ promettra en son temps le Royaume des cieux. Ces pauvres savent qu’il n’est rien dont ils peuvent se faire valoir devant Dieu. Mais ils savent plus encore qu’il n’est rien qu’il ne puisse fermement espérer de la miséricorde de Dieu. « Et moi pauvre et mendiant, le Seigneur pense à moi. Toi mon secours et sauveur, mon Dieu ne tarde pas. Toi Yahvé tu ne fermes pas pour moi tes tendresses ! ta miséricorde et ta vérité sans cesse me garderont » (Ps 40). Pour recevoir le Royaume, le fidèle assimile cette béatitude de la pauvreté qui le fait devenir mendiant de la miséricorde. L'Amour est l'achèvement de la Création.

-       Les Psaumes nous rappellent aussi vivement que cet Amour miséricordieux, cet Amour infini manifeste la Gloire de Celui qui nous invite à partager sa Vie. Ce thème de la majesté et de la sainteté de Dieu qui traverse toutes les prophéties d’Isaïe nous rappelle sans cesse la grandeur insoupçonnable de cet Amour : « Rapportez à Yahvé, fils de Dieu, rapportez à Yahvé gloire et puissance, rapportez à Yahvé la gloire de son nom, adorez Yahvé dans son éclat de sainteté » (Ps 29)

-       Cependant la contemplation du Dieu de sainteté ne doit pas nous faire perde de vue l’intimité paradoxale à laquelle Dieu nous appelle, cette religion du cœur que nous dévoile les livres de Jérémie. Le psautier va là encore assimiler ce thème splendide sous forme d’une prière pour nous le donner en nourriture : « Il garde à jamais la vérité, il rend justice aux opprimés, il donne aux affamés du pain, Yahvé délie les enchaînés. Yahvé rend la vue aux aveugles, Yahvé redresse les courbés, Yavhé protège l’étranger, il soutient l’orphelin et la veuve » (Ps 146). Yahvé prend soin de chacun avec une sollicitude de bon pasteur : « le Seigneur est mon pasteur, je ne craindrai aucun mal, il me conduit dans de verts pâturages, il me fait reposer auprès des eaux paisibles…(Ps 23). Yahvé est enfin celui qui nous connaît mieux que nous même : il est le cœur de notre intimité : Yahvé tu me sondes et tu me connais ; que je me lève que je m’assois, tu le sais, tu perces de loin mes pensées ; que je marche ou me couche, tu le sens, mes chemins te sont tous familiers…Sonde-moi, O dieu, connais mon cœur, scrute-moi, connais mon souci ; vois que mon chemin ne sois fatal, conduis-moi sur le chemin d’éternité » (Ps 139).

-       Nous arrivons alors au point focal de toute la révélation. Le Dieu de sainteté, le Dieu de toutes les miséricordes, ce Dieu qui nous est plus intime que nous même veut nous demeurer présent, il veut planter sa tante parmi nous. C’est cette présence de Dieu qui demeure le mystère fondamental d’Israël et de l’Eglise : « Jusqu’à toi viens toute chair avec ses œuvres de péché ; nos fautes sont plus fortes que nous mais toi tu les effaces….Tu visites la terre et la fais regorger, tu la combles de richesses » (Ps 65). « Mieux vaut un jour en tes parvis que mille à ma guise, rester au seuil dans la maison de mon Dieu qu’habiter la tente de l’impie (Ps 84)

-       Dieu vient nous visiter. Il traverse notre humanité blessée nous ouvrant les voies de la divinisation, c'est-à-dire de la filiation divine. Nous sommes appelés à devenir sa ressemblance en vivant en enfant de lumière : « Envoie ta Lumière et ta vérité : elles me guideront, me mèneront à ta montagne sainte, jusqu’en tes Demeures. Et j’irai vers l’autel de Dieu, jusqu’au Dieu de ma joie, j’exulterai, je te rendrai grâce sur la harpe, Dieu mon Dieu » (Ps 42-43)


Ces exemples nous montrent que, loin de nous emporter dans de pénibles considérations théologiques, le psautier nous conduit simplement au cœur de la révélation. Cette prière complète nous met en permanence au contact de Dieu, sans détour, et sans autre méthode que de nous faire chanter les merveilles de Dieu dans l’œuvre de sa Création.

Dieu nous a certainement donné par le Psautier la plus puissante mais aussi la plus simple méthode de prière. Dieu va jusqu’à nous révéler comment Le prier, pourquoi donc nous en priver ? Dans le Psautier il n’y a pourtant aucune description d’une quelconque méthode d’oraison. C’est un pur jaillissement permanent qui vient du plus profond du cœur. En priant les psaumes nous ouvrons simplement nos cœurs meurtris au traitement de sa miséricorde. Le Psautier traditionnel est à redécouvrir pour que nous puissions nous en nourrir chaque jour. La pratique du Psautier est certainement l’une des plus magnifiques expériences spirituelles que tout fidèle est appelé à vivre.

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